Législatives: Quand Blaise Louembe confond l’Assemblée nationale avec une caisse de charité

À l’approche des élections législatives, la déclaration de Blaise Louembe, président du Parti démocratique gabonais (PDG) a de quoi faire sourire ou grincer des dents. L’ancien ministre, aujourd’hui candidat à un siège de député, a promis de reverser son salaire de parlementaire aux populations de Koulamoutou, s’il venait à être élu. Une annonce qui, derrière son vernis de générosité, soulève de profondes interrogations sur la conception qu’a l’intéressé du rôle d’un élu de la Nation.
Un discours populiste qui frôle le grotesque
Présenter le salaire de député comme une manne à distribuer à coups de dons et d’aumônes, c’est réduire la fonction parlementaire à une œuvre caritative. En réalité, l’Assemblée nationale n’est pas un champ d’action humanitaire. Elle est une institution centrale où se discutent, se rédigent et s’adoptent les lois qui encadrent la vie des citoyens. Un député n’est pas un mécène, mais un législateur.
Cette promesse sonne donc creux: qu’adviendrait-il si chaque élu se contentait de « redistribuer son salaire » au lieu de contrôler l’action gouvernementale, de débattre des politiques publiques et de défendre les intérêts de sa circonscription par le travail législatif ?
Le vrai rôle d’un député au Gabon
Un député est censé:
- Élaborer et voter les lois qui organisent la société.
- Contrôler l’action du gouvernement, en exigeant transparence et responsabilité.
- Représenter les citoyens de sa circonscription à l’échelle nationale.
C’est en exerçant ce mandat avec rigueur et indépendance que l’on contribue réellement au bien-être des populations, non en distribuant une partie de ses revenus comme une faveur personnelle.
Une manœuvre électoraliste
Pour rappel, Blaise Louembé, né le 20 février 1960 à Koulamoutou (Ogooué-Lolo), est un homme politique gabonais et membre du Parti démocratique gabonais (PDG). Haut fonctionnaire de formation, il a été Trésorier-Payeur Général en 2000 avant d’entrer au gouvernement en 2008 comme ministre de l’Économie, des Finances, du Budget et de la Privatisation. Il occupera ensuite divers portefeuilles stratégiques, notamment celui du Budget, de la Fonction publique et de la Réforme de l’État (2009), puis celui de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs (2014). Député élu du 1er arrondissement de Koulamoutou, il est revenu au gouvernement en janvier 2023 comme ministre d’État chargé du Développement industriel et des PME, avant d’être élu président du PDG en janvier 2025. Donc, il s’agit d’une éminent personnage du régime qui aurait été déchu au Gabon après les fameux événements du 30 août 2023.
Derrière ce geste soi-disant altruiste, il est difficile de ne pas voir une stratégie populiste, destinée à séduire un électorat fatigué des promesses non tenues. Or, la politique ne devrait pas se réduire à l’achat symbolique de bonnes grâces, mais à la construction de cadres légaux solides pour l’éducation, la santé, l’emploi et la justice sociale.
La déclaration de Blaise Louembe révèle une méconnaissance ou un mépris du rôle institutionnel du député. Plus qu’un salaire distribué comme une aumône, les populations de Koulamoutou attendent une véritable représentation politique, capable de transformer leurs aspirations en lois, en projets structurants et en politiques publiques durables.
L’Assemblée nationale n’est pas un tiroir-caisse, mais le cœur battant de la démocratie. Les Gabonais méritent des députés conscients de cette mission, pas des philanthropes improvisés.